Volume 9, numéro 3, printemps 2018
Au Québec, le nombre de visites des personnes âgées aux urgences a considérablement augmenté et les infirmières y travaillant seront de plus en plus en contact avec elles au cours des prochaines années. Si certaines infirmières démontrent parfois peu d’intérêt à soigner les personnes âgées, d’autres entretiennent des attitudes négatives à leur égard. Ces attitudes peuvent nuire à la qualité des soins et au bien-être des personnes âgées en diminuant leur autonomie fonctionnelle, en augmentant la durée de leur hospitalisation et en augmentant leur risque de mortalité.
Les attitudes des infirmières à l’égard des personnes âgées ont été peu explorées dans la culture de la salle d’urgence. À cet effet, une ethnographie a été réalisée dans le but de mieux comprendre les significations de soigner des personnes âgées pour des infirmières travaillant à la salle d’urgence. Elle visait à répondre aux questions suivantes :
La théorie intermédiaire de Schigelone (2003) a été le cadre de référence utilisé pour guider cette étude. Cette théorie, développée pour la discipline de la gérontologie sociale, utilise le concept d’attitude âgiste pour comprendre les raisons de la présence d’attitudes et de comportements négatifs chez les professionnels de la santé.
Six infirmières travaillant dans la salle d’urgence d’un centre hospitalier d’un CIUSSS-de-l’Île-de-Montréal ont participé à cette étude. Parmi elles, trois travaillaient de jour, deux, de soir et une, de nuit. La collecte de données a été réalisée au moyen d’observation à distance d’infirmières, d’entretiens semi-structurés et de conversations informelles. Ces données ont été analysées à l’aide de la méthode d’analyse thématique de Braun et Clarke (2006).
Les résultats indiquent que soigner est un verbe qui est lourd de sens, assorti de différentes épithètes entraînant diverses réactions lorsque associés à la personne âgée. D’attitudes positives à négatives, celles qu’adoptent les infirmières de la salle d’urgence d’aujourd’hui en ce qui concerne les soins aux personnes âgées sont davantage négatives. Cette réalité découle de l’augmentation incontestable de leur nombre dans ce milieu de soins, ce qui provoque ainsi un paradoxe entre la culture de soins d’urgence et celle des soins aux personnes âgées. Nos résultats soulignent qu’il est significatif pour les infirmières travaillant à la salle d’urgence de s’engager dans une dynamique de soins humaniste envers les personnes âgées afin d’assurer non seulement des soins de qualité, mais aussi leur bien-être. En outre, notre étude démontre que, pour soigner une personne âgée, il est important de « prendre en charge » globalement, ce qui relève de l’holisme et de l’évaluation de la personne âgée en tenant compte de dimensions physique, émotionnelle, mentale et environnementale. Toutefois, dans le contexte de la salle d’urgence, les infirmières considèrent cette prise en charge comme étant complexe et difficile. D’autre part, les significations qu’accordent les infirmières aux soins aux personnes âgées semblent être influencées par leurs perspectives plutôt négatives sur le vieillissement ainsi que par le rythme des soins à la personne âgée, imposé par un système de santé qui prône la performance. Il semble que ces éléments ont une influence sur la possibilité des infirmières à reconnaître l’importance des personnes âgées et à accepter la complexité de leurs soins ainsi que leur individualité.
Il est impératif de revaloriser l’humanité au cœur des soins d’urgence à tous les niveaux, d’autant que les personnes âgées sont bien présentes dans ce milieu. À cet égard, nos résultats démontrent que pour y arriver, il est nécessaire que les infirmières pensent à leurs soins dans une perspective infirmière, et non biomédicale. À ce sujet, il faut guider les infirmières et les étudiantes infirmières pour qu’elles s’approprient l’art du « prendre soin » en favorisant l’acquisition de connaissances et le déploiement de compétences à l’égard des soins aux personnes âgées. De telles mesures permettraient aux personnes âgées d’être soignées avec des soins de qualité en toute dignité.
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Geneviève Leblanc, inf., M. Sc.
Anne Bourbonnais, inf., Ph. D.
Braun, V. et Clarke, V. (2006). Using thematic analysis in psychology. Qualitative Researchin Psychology, 3(2), 77-101. doi: 10.1191/1478088706qp063oa
Schigelone, A. R. (2003). How can we ignore the why? Journal of Gerontological Social Work, 40(3), 31-50. doi: 10.1300/J083v40n03_04
Le prix Innovation clinique Banque Nationale 2018 de la région de la Montérégie est décerné au projet « Conduite pratique de l’allaitement maternel du nouveau-né prématuré de 32 à 36 6/7 semaines », présenté par Claude Bonneau, consultante en lactation, Mère-enfant-famille et Pédiatrie, Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Est.
Ce projet novateur guide la conduite pratique de l'allaitement des bébés de prématurité tardive, de la naissance jusqu'à la sortie de l'hôpital, et vise l’atteinte d’un allaitement exclusif au sein.
L'objectif principal de ce projet est d'améliorer le taux d’allaitement chez la population des nouveau-nés avec une prématurité tardive ou les nouveau-nés malades, par le biais de l'implantation d'un outil clinique permettant l'initiation et le maintien de l'allaitement. L'outil, comprenant la « Fleur de lait », protège la dyade mère-enfant en permettant d’éviter leur séparation, qui est trop souvent observée chez cette clientèle. Le recours à cet outil permet de prévenir et de détecter les tétées inefficaces, d'observer la maturité de la succion du nouveau- né et de s’assurer que le nouveau-né reçoit un apport suffisant en lait maternel.
L'outil guide la pratique infirmière et médicale quant au contact peau à peau afin que celui-ci soit pratiqué de façon sécuritaire en tenant compte des particularités du nouveau-né prématuré. De plus, les interventions cliniques découlant de ce projet permettent au nouveau-né de stabiliser ses fonctions vitales ainsi que d’assurer un meilleur contrôle glycémique. Le projet est basé sur des données probantes et permet de mettre en place des conditions favorables afin que les mères puissent offrir à leur nouveau-né prématuré ou malade le meilleur aliment qui soit.
L’outil facilite la communication et la formation continue pour les infirmières. Il permet à la mère de se sentir plus compétente face à son allaitement grâce à la « Fleur de lait » et de suivre les progrès de la succion de son bébé. La « Fleur de lait » est utilisée par l’infirmière et par la mère pour l’observation de la tétée et permet de constater visuellement les progrès du nouveau-né, ce qui est encourageant pour les parents.
L'outil « Conduite pratique de l'allaitement du nouveau-né prématuré de 32 à 36 6/7 semaines » guide l'infirmière dans le soutien qu'elle offre aux familles et dans l'enseignement qu'elle leur prodigue. De plus, il permet d'évaluer la tétée, de décider de la pertinence d’ajouter un complément de formule de lait chez ces bébés ainsi que des modalités de supplémentation, de s'assurer du bon positionnement de la mère et celui du bébé lors de la tétée et de déterminer des stratégies permettant d’offrir des soins qui préservent l’énergie du nouveau-né. Un journal d'expression du lait est remis et enseigné à la mère pour lui permettre de suivre la progression de sa production de lait.
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